Manger au féminin : Café My House
Par Scott Simpson
Je me rends direction rue Wellington Ouest un après-midi ensoleillé pensant aux questions que j’allais posées à Briana Kim, chef et propriétaire du Café My House, mais pas trop. Je préfère m’y prendre style WTF with Marc Maron. J'arrive trop tôt, donc je m’installe au Ministry of Coffee en sirotant un nitrogen cold brew. Je décide de prendre le soleil sur leur p’tite terrasse bien cute, mais à peine assis je remarque Briana sortir de l’appartement situé directement au-dessus de son resto. Je me demande si elle y habite. Elle se tourne vers moi lorsque je l’approche, et m’accueille chaleureusement.
Le Café My House est facilement une des meilleures tables de la région. Ouvert en 2009 et initialement situé sur la rue Bank, il déménage à son emplacement actuel dans le quartier Hintonburg en 2014. En soirée, on propose un menu « découverte » à prix fixe de 5 ou 10 services et des plats à partager; les weekends on y offre des brunchs délectables qui valent un détour. Briana est une chef décorée : elle gagne l’édition 2017 des Gold Medal Plates, une première pour un plat végétalien, et elle représente Ottawa au Canadian Culinary Championships (CCC) à Kelowna. Sa cuisine est recherchée, créative, et passionnée.
On s’installe au bord de la fenêtre, à la table où j’ai mangé mon premier repas à ce resto qui est vite devenu un de mes préférés, même avant mon virage végé. Elle mentionne que plusieurs de ses employés ne sont pas forcément végé, ce qui me porte à lui demander si elle-même est végétalienne. Pas forcément non plus, mais plus parce qu’elle n’aime pas les étiquettes. Ça tombe bien, moi non plus.
Quand je lui parle un peu plus du concept de cette chronique, elle me confirme le manque de femmes dans l’industrie, mais que c’est aussi vrai de plusieurs industries. J’acquiesce. Mais, elle m’indique que lors de son passage au CCC, elle fut impressionnée par le ratio de femmes dans la cohorte d’étudiants.es qui assistaient les chefs pendant la compétition. Ça regarde bien pour le futur des cuisines ! Et présentement, sa cuisine est quasiment 100 % féminine, plutôt par hasard. Elle remarque qu’elle reçoit plus de candidatures féminines. C’est aussi vrai de la salle à manger. Je lui dis que j’aime ça, et que ça se voit dans l’ambiance. Elle accueille souvent des chefs d’un jour ou d’un weekend, parfois d’ici, souvent de l’extérieur. Sa passion pour la nourriture et pour son métier est palpable.
Briana a toujours aimé cuisiner, et sa mère est d’une grande influence. Sa mère cuisinait de tout : sa propre cuisine coréenne, mais aussi japonaise, française et italienne. Lorsqu’elle découvre la cuisine à base de plantes, elle y voit la possibilité d’innover, d’imaginer et de créer. J’imagine qu’elle est le genre de personne qui ne croit pas à la perfection, car ça veut dire qu’elle peut toujours apprendre plus. Elle mentionne à quelques reprises que la cuisine, c’est l'endroit où elle peut réellement s’exprimer.
On parle d’Ottawa-Gatineau, de son évolution, et de ses idiosyncrasies. Elle se demande si elle aurait eu la même longévité dans une ville comme Montréal ou Toronto. Quand je la questionne sur son choix de quartier, et si c’était un choix délibéré, elle me répond oui et non. Elle regardait aussi ailleurs, mais elle est très heureuse du quartier choisi. Ah oui, et elle habite effectivement l’appart du haut ! Je remarque que ça doit être pratique, mais aussi difficile de séparer la vie personnelle de la vie professionnelle. Elle me confirme que oui. Mais ses journées, c’est pas mal au resto qu’elle les passe. Quand tu fais une réservation, ça arrive fréquemment que ce soit elle qui réponde. “Fais-tu quasiment tous les services ?”je lui demande. Elle hoche de la tête.
Ce qu’elle aimerait voir se développer dans la région ? Plus de commerces indépendants, plus d’entreprises menées par des femmes, et de continuer dans l’élan actuel. Je mentionne une entrevue dans laquelle elle indique que sa mère lui avait dit que si elle se lançait en affaires, ça devrait être pour au moins 10 ans. Elle approche justement des 10 ans. Elle est émue à la mention, et me répond en riant que c’était probablement pour la dissuader. Clairement, et heureusement, ça n’a pas marché.
Que voit-elle pour le futur de son entreprise ? Certains de ses plans, elle n’est pas prête à en parler. D’autres elle m’en parle, mais off the record. Disons que de l’ambition, elle n’en manque pas. Mais entre-temps, son resto demeure bondé et son menu continue de changer et d'évoluer.
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C'est où ? 1015 rue Wellington O, Hintonburg