Lunch and lunching : Lydia Lunch et KAY-fayb au Club SAW
Lunch and lunching d’un rétrovirus pour chastes en chaleur
Par José Claer
Genèse avec un soupçon de saxo-sexe avec KAY-Fayb en première partie
Des fois, il faut une clef. De sol comme le solstice ou le solennel. Quelque part mais pas nécessairement dans le temps. Sur une musique d’intérieur de scanner médical sur le spin, une fille, Yolande Laroche, se fait majuscule d’énergie, chaste chatte ou goule qui invente un langage en pattes de mouche et en pattes d’éléphant. Elle a un diamant dans la bouche. Les mots saignent à chaque tirage au sort de sa langue. Le saxo de Linsey Wellman est un maquereau en chapelle Sixtine, les claviers de Pierre-Luc Clément font du lèche-babine. Un texte sur une « sister sorcerer » et la raison perd pied comme Cendrillon son soulier.
Buffet all you can meet-market
Je suis au Club SAW pour écouter-déguster-pogner en feu sauvage et suave sur toutes les parties visibles et invisibles de mon besoin insatiable de me laisser confisquer l’âme par cette Lydia Lunch en voix (oui) d’apparition.
Pedigree : Punk rockeuse poétique sans justice avec une élégance à coucher dehors même en hiver, une dégaine comme une brûlure d’amour-propre au 666e degré, l’intelligence de l’humour et la gueule pleine de mots mâchouillés comme des Soleils à 5 cennes. Cette fille est une orgie de verbes : oser-sacrilégier-gouailler-transpirer le Vrai, le Pur et surtout un Rétrovirus (le band) qui nous a tous contagionnés, volontairement, nous ses amant.e.s-cobayes.
Pedigree 2 : Y a pas de demi-mesure ici, on boit à même la bouteille le cocktail Molotov qu’elle nous tend en guise de berceuse pour réveiller les sorcières, elle nous punch aux fruits défendus, elle nous désoriente le carpe diem, direction ses acts of Evils avec ses chansons-révélations. Incarnant plus que revisitant : un cri à décoder entre « no excuse, love spits better than blood, I’m afraid I will wake up in your dream lesson/session with your mechanical mother fuck skull ». Elle a du Kate Bush électrifiée sur un bol de toilette, la lunette servant d’auréole à quelque Jésus drag queen, du Siouxsie Sioux, c’est une banshee bachi-bouzouk, une Lilith sur un piédestal tout en seins de Wendy O. Williams. Prestidigitatrice aimantée au grand nettoyage par le vide. Aucun orgasme ne lui résiste. C’est la reine, non, c’est la comtesse Dracula qui nous invite à percuter notre miroir sans fond à 666 km / de folies folles à l’heure.
Ça fait maintenant 15 minutes que son show-chaud est terminé.
Titubante sur ses souliers de marraine-fée-pirate, Lydia retrouve le gouvernail de fusée dont la trajectoire est dessinée entre les galles aux genoux et les grains-de-beauté de sa propre enfance. Droit devant. Guidant le mystère, elle-même Orphée ou Morphée.
Et je demeure en déséquilibre, sevré, mais pas totalement, par cette chanteuse qui porte dans sa matrice et sur son dos de veuve noire, la contre-culture dont toutes les sutures ont sauté dans sa face, lui garantissant une beauté de majuscules rides et rages, d’espiègle à grimace qu’on a envie de bercer dans un lit de fuck fakir.