Série MASC : une entrevue avec l'artiste Daniel Richer
Cet article fait partie d’une série mettant en vedette des artistes et groupes MASC, un organisme artistique de la région qui créé des ponts en arts et culture en unissant des enfants, des jeunes, des enseignants et des aînés de la communauté à des artistes d’Ottawa-Gatineau.
Par Jessica Ruano
Enseignant, étudiant, acteur, crieur public et conteur de légendes sont tous des rôles qu’assume pleinement Daniel Richer. Depuis plus de quarante ans, il joue sur de nombreuses scènes et crie pour de nombreux grands événements, mais ce qu’il trouve le plus significatif, c’est de découvrir ses racines, d’apprendre et de partager la tradition de la communication orale des Premières Nations avec des publics de tous les âges. Dans cette entrevue, Daniel parle de ce qui fait un.e bon.ne professeur.e et de l’importance de rendre l’art accessible à tous.
Au cours de vos nombreuses années de carrière, vous avez parlé du « vide » que vous avez vécu, ce qui vous a amené à redécouvrir vos racines autochtones. Comment avez-vous procédé et comment pensez-vous que ce processus a servi votre pratique artistique et culturelle?
Daniel : Ce n’était pas tant de redécouvrir mes racines que de laisser sortir le secret, commencer à partager les histoires et les traditions qui m’ont été transmises par ma grand-mère et par d’autres, tout au long de mon enfance. Quand j’étais enfant, j’étais souvent malade et ces histoires étaient comme une couverture de sécurité. Lorsque j’ai commencé à partager ces légendes avec mes enfants et ensuite avec d’autres, en dehors du noyau familial, j’ai réalisé que cela me mettait à l’aise, que cela avait de l’importance pour moi, que cela devait faire partie non seulement de mon identité, mais aussi de ma mission en tant qu’artiste.
À l’occasion de la Journée du chandail orange, vous avez donné une présentation en ligne pour la Bibliothèque publique d’Ottawa. Le week-end dernier, c’était l’Action de grâce, un moment où de nombreux habitants de l’Île de la Tortue choisissent de réfléchir aux injustices commises à l’encontre des peuples autochtones. En tant qu’artiste et en tant qu’être humain, comment reconnaissez-vous ou commémorez-vous ces journées empreintes de signification?
Daniel : Ces enfants sont toujours avec nous. Ces injustices ne sont jamais oubliées dans notre vie quotidienne ou dans nos spectacles. J’essaie de ne pas m’attarder au côté négatif, à la douleur, mais plutôt à la résilience et la force de ceux et celles qui sont passés par là. Ce sont des leçons à tirer et à ne jamais oublier. En suivant et en partageant les enseignements et les traditions de nos aînés, nous espérons que d’autres apprendront également.
En tant que membre de MASC, que gagnez-vous à proposer vos spectacles dans les écoles et dans la communauté?
Daniel : Mon père était enseignant, et il disait qu’un.e bon.ne professeur.e apprend en enseignant. Le fait d’animer des ateliers dans les écoles me donne souvent cette occasion. Lors d’un programme de résidence à Kars, en Ontario, j’ai collaboré avec la grande artiste algonquine Kelly Church et j’ai appris d’elle. Kelly connaissait tout de la collecte, de la préparation et de l’utilisation de l’écorce. Nous avons également été agréablement surpris par les progrès de ce groupe d’élèves ainsi que par leur ouverture et leur intérêt marqué. La population de cet établissement scolaire était entièrement blanche, mais les élèves étaient avides d’en savoir plus sur notre peuple; c’est un bel exemple d’espoir pour l’avenir.
Vous proposez des ateliers et des spectacles pour les enfants de la maternelle à la douzième année, ainsi que pour les personnes âgées. Qu’avez-vous appris en travaillant avec ces différents groupes d’âge?
Daniel : Plus ils sont jeunes, plus il est facile de les faire participer. En vieillissant, la compréhension des jeunes s’améliore, ils apprennent plus vite et sont capables de communiquer plus facilement, mais ils ont aussi appris à construire des murs et c’est triste parce qu’il devient plus difficile pour eux de s’ouvrir, de se laisser aller et de profiter. Heureusement, les aînés présentent souvent une combinaison de l’intelligence et de l’ouverture de ces deux groupes d’âge.
Pourquoi pensez-vous qu’il est important pour notre collectivité d’avoir accès à des artistes professionnels?
Daniel : L’art appartient à tout le monde et doit être offert au plus grand nombre de personnes possible. L’art met en mots, en musique et exprime visuellement ce que nous ressentons à l’intérieur. L’art nous permet de célébrer la complexité de nos émotions, qu’elles soient heureuses ou tristes. L’art doit être accessible à tous et MASC offre cette opportunité qui est en quelque sorte un réel cadeau.
Pour en savoir plus sur Daniel Richer et sur d’autres artistes MASC, lisez notre série MASC, visitez le site web de MASC et suivez-les sur Facebook, Twitter et Instagram.