Premier concert depuis un an : Louis Venne nous frappe de plein fouet!
Par Cindy Savard, une collaboration avec Sors-tu.ca.
Après douze longs mois passés à me morfondre m’introspecter dans ma tanière, l’alerte dans mon calendrier me rappelant que j’avais un SHOW à aller voir me subjugue encore aujourd’hui. Jamais je ne me suis sentie aussi fébrile avant de me rendre à un concert, vivement la pandémie parce qu’elle m’aura permis d’apprécier chaque moment passé dans la salle Jean-Despréz avec nul autre qu’un artiste tout à propos pour la grande occasion : Louis Venne. Enfin l’opportunité de vivre en formule live l’expérience de l’album tant savouré dans mon ilôt de chaleur, Comme une bête dans les headlights qui, sorti en octobre 2019 avait été stoppé dans ses mouvements, une statue qui avait enfin l’aval pour reprendre vie devant PUBLIC.
Comme premier spectacle d’après confinement, ce choix était tout à propos disais-je, oui, puisque Louis Venne se démarque par son appartenance à la région, il est né à Hull et a évolué dans la culture franco-ontarienne, cumulant les éloges, récipiendaire de cinq prix Trille Or pour son premier album Le Café des oiseaux sorti en 2010 et plus récemment, par l’attribution du prix du ROSEQ à Contact Ontarois 2019. Autre fait intéressant, c’est qu’il a l’âme à l’aventure, la vraie. Audacieux, il a concrétisé un projet fou en parcourant 7 000 kilomètres en canot à travers le Canada… de quoi mériter toute l’admiration des amateurs d’exploration de la nature et de grand air sauvage!
Tout aussi nerveux et excité que moi, Louis Venne s’est présenté dans une formule trio plutôt que quatuor avec, à ses côtés, François Petitpas à la basse et Pierre-Luc Clément à la batterie et au clavier. Si l’espace scénique était occupé avec timidité, il faut dire que le public aussi avait du mal à se relâcher, comme saisi par l’absurdité de la chose, surpris par l’idée qu’il avait le droit d’être là et conscient qu’il était en train de franchir la première étape d’une ère de réadaptation à la vie sociale. Le son de la mouche qui volait au-dessus de la scène s’est doucement éclipsé pour laisser place à la ferveur de Louis Venne avec Comptoir, la deuxième pièce de son plus récent album, celui qu’il considère comme son premier. Co-réalisé par Olivier Fairfield, il fait l’objet d’un travail minutieux d’écriture merveilleusement arrangé, la symbiose entre les paroles et la musique s’opère, laissant place à une mouture finale fluide et juste assez tempérée. La prestation live, plus fidèle qu’espérée, a été honorée par l’équipe de la régie chargée de l’ambiance lumineuse, juste assez feutrée, juste assez colorée, on était enfin de l’autre côté du tunnel. Malgré l’instabilité du contexte, la voix et les facultés de l’artiste étaient en parfait contrôle.
N’osant référer, sous aucun prétexte, à la crise qui nous assaille depuis un an et qui a viré nos vies à l’envers, ses interventions entre les chansons étaient constamment tournées à la blague, nous remerciant de s’être déplacés et d’avoir bravé “le froid et la tempête” pour prendre part à ce moment de grâce. Une anecdote forcée par Pierre-Luc Clément l'oblige à nous raconter l'histoire derrière la pièce Gaz, on sent qu'il aimerait être plus volubile mais on le comprend, nous sommes tous déphasés! La cadence est marquée de langueur, l’espace temps est palpable, nous sommes figés, fouettés, comme aspirés dans un univers surréel. La grandeur des textes de Louis Venne jumelés aux riff de guitares électrisants de pièces comme Retrouvailles, à la basse entraînante de Mes beaux habits auraient mérité des envolées d’applaudissements, c’était souffrant de ne pouvoir se lever et de crier pour dire : “Allo! J’apprécie, beaucoup. C’est donc ben bon d’être ici, avec toi pis toi pis toi!”. Dispersé dans une salle pouvant contenir 254 âmes, le public était composé d’une vingtaine de fans discrets, tous bien trop éloignés et probablement bien trop émus pour pouvoir exploser de saveur!
Louis Venne n'a pas manqué d'offrir la nouvelle version de la pièce Plaine qu’il a revisitée pour intégrer le talent de l’artiste montréalaise Poulin. Et puisque chaque bonne chose à une fin (!), l'artiste avait judicieusement sélectionné sa dernière pièce pour nous présenter un nouveau morceau. Dans les paroles on dirait Desjardins, dans le maniement de la musique on dirait Fred Fortin. Un mélange bien fabriqué qui promet et qui permet une belle occasion de s’injecter une dernière dose d’un concert éphémère mais ô combien nécessaire pour irriguer nos canaux asséchés.